
On connaissait bien évidemment son piment et son jambon. On savait qu’il y avait du foie gras dans le coin sans avoir véritablement fait le lien avec le Lot et le Périgord dans nos têtes. On savait aussi pour le fromage, les tapas ou plutôt les pintxos et la jolie architecture traditionnelle. Ce à quoi on n’avait pas véritablement été préparés je pense, c’est d’expérimenter tout cela ensemble, cumulé, dans un laps de temps aussi court qu’intense en émotions.





Les vacances de Toussaint. Nous avons décidé de couper la poire en deux et partager la semaine entre la famille et la découverte d’une région dont nous rêvions depuis un certain temps. La famille, c’est-à-dire les parents de Guillaume, a déménagé printemps dernier à Pornic, une petite ville balnéaire du sud de la Bretagne bien que son appartenance à cette région géographique soit fortement contestée, je le sais. Très agréable, du moins hors saison, c’était notre deuxième séjour et nous sommes toujours autant charmés. La côte est absolument fabuleuse avec ses sentiers sinueux, les dispositifs de pêche brodés tout le long du littoral, les plages miniatures abritées dans des crêtes qu’on découvre soudainement en contrebas au détour d’une étroite montée rocheuse. Le vent y est fort, il décoiffe, et le soleil, quand il décide de se montrer, éblouissant. Un terrain d’un perpétuel défi d’ailleurs pour nous, les coureurs du dimanche et surtout du plat. Nous nous sommes offert un luxe que nous avons beaucoup de mal à nous refuser quand nous nous trouvons dans le coin – un dîner de fruits de mer et surtout de homards d’une fraîcheur inégalée puisqu’on les a choisis nous même le matin dans le grand aquarium de la poissonnerie du quartier. Le WE est passé en un clin d’œil, le moment est arrivé de faire de gros bisous à notre petite chérie, de lui dire d’être sage avec ses grands-parents et on met le cap sur Biarritz.




En cette saison, s’attendre à n’avoir que du beau temps, même dans le Sud serait clairement utopiste mais nous avons néanmoins eu de la chance et notre toute première journée a été plutôt ensoleillée bien que battue par des vents forts. Munis de deux bouteilles d’eau et d’un appareil photo, nous en avons profité pour nous rendre au pied de la Rhûne avec comme objectif la montée à pied et la descente en petit train panoramique. D’après les guides il fallait prévoir à peu près deux heures et demie voire plus pour la montée et nous en avons rapidement compris la raison. C’est qu’elle est raide et assez longue sans pause aucune sur le premier kilomètre ou même deux. S’ensuit une partie relativement plate et le parcours se termine par une autre montée, pas forcément moins longue mais plus escarpée et du coup au moins pour moi plus facilement négociable. Epuisés, les joues rougies par les rafales de vent nous voilà enfin en haut. Une vue panoramique à tout point extraordinaire nous y attend. Vers le sud, l’Espagne et les majestueux sommets déjà (toujours ?) couverts de neige des Pyrénées, vers l’ouest l’océan, plus près des pâturages, des vallées, la forêt.
Un incident malheureux a cependant marqué cette randonnée. Lors de l’ascension, nous avons croisé un couple de personnes déjà relativement âgées qui faisait la route dans le sens inverse. Une centaine de mètres nous séparaient encore alors que d’un coup la dame s’est mise à gesticuler et à appeler à l’aide. Son mari venait de glisser et tomber du haut d’un petit ponton dans le ruisseau qui traversait la vallée à cet endroit (les Trois sources, comme nous l’avons appris plus tard en essayant de nous localiser). Heureusement derrière nous arrivait un autre randonneur qui a pris les choses en main, a tiré le mari du ruisseau et lui a fait tout de suite un massage cardiaque. Pendant ce temps, nous avons appelé les secours et les avons guidés de notre mieux. D’autres personnes se sont arrêtées, y compris deux infirmiers qui heureusement avaient sur eux des couvertures thermiques et de quoi procurer les premiers soins. Nous ne connaissons pas la fin de cette histoire mais nous espérons de tout cœur qu’il a connu une fin heureuse.





Le reste du séjour a été heureusement moins dramatique. Le lendemain, sous une pluie par moments fine, par moment drue, nous avons visité la ville de Bayonne ou nous avons fort mal déjeuné d’ailleurs. Sûrement à cause de mon impatience car d’un côté j’avais très faim et de l’autre, je n’avais pas envie de passer plusieurs heures à chercher l’endroit idéal car le mieux c’est l’ennemi du bien, n’est-ce pas ? Pas toujours. Pas de quoi se lamenter car nous nous sommes rattrapé le soir au restaurant étoilé de l’Atleier de Gaztelur. L’endroit est tout à fait magique, déjà un peu en dehors de Biarritz avec un grand jardin, des ateliers, une boutique d’antiquités si j’ai bien compris que nous avons malheureusement pas pu visiter car il faisait nuit mais cela nous a donné l’envie d’y retourner. La cuisine recherchée, avec une touche orientale (un nem, des perles du japon, du coco). Un foie gras sublime et un soufflé aux châtaignes à … vous couper le souffle, c’est le cas de le dire !










Nous avons adoré la visité de la très belle Saint-Jean-de-Luz avec sa promenade, son architecture typique rouge et blanc, son petit port. Et nous y avons fort bien mangé d’ailleurs, et complètement par hasard au petit restaurant très justement appelé Instincts. On est passés devant sans presque l’apercevoir puis on est retournés sur nos pas pour jeter un coup d’œil à la carte et au décor, bien sympathiques les deux au premier regard, et on a continué notre promenade. L’heure du déjeuner arrivée et échaudée par l’échec récent à Bayonne on a ouvert le guide pour partir à la recherche de conseils avisés, et puis non. L’Instinct. L’endroit est très sobre et (sûrement faussement) simple. Un seul homme dans la cuisine et son amie (collaboratrice ?) dans la salle. Des tables, pas nombreuses, des clients polis et pas bruyants pour un sou, une vaisselle tout en céramique, accessoires en bois et textile. Des plats raffinés, étonnants (le boudin en entrée juste exquis). Les fromages viennent des fermes avoisinantes ce qui est le cas pour la plupart des produits, je soupçonne. Et pour terminer, un dessert qui m’a replongée en moins de deux dans mon enfance – une pomme pochée servie avec de la glace et une crème au halva. A l’époque soviétique, on manquait à peu près de tout sans pour autant souffrir de faim ou de carences particulières, en partie grâce au potager de maman. Cependant, à peu près la seule sucrerie qu’on pouvait trouver absolument partout et à tout moment était le halva confectionné à base d’arachides ou de graines de tournesol. Après plus de trente ans, voilà que je retrouve ce goût longuement oublié dans mon assiette au bord de l’océan atlantique dans un petit restaurant gastronomique avec comme voisin de table Pierre Niney. La vie peut être sacrement drôle dès fois.





Il faut que je vous parle encore de la promenade autour du village d’Espelette, tellement célèbre pour son piment. On est partis pour une autre journée de randonnée en comptant sur des éclaircies car le temps se montrait obstinément maussade depuis quelques jours. Sandwichs au jambon espagnol et au fromage local (mais au final, tout ce qui est basque est local) dans le sac à dos, les chaussures de randonnée dans le coffre de la voiture, nous partons d’abord faire un petit tour du village, appelé promenade des familles. Visites des fermes, de l’atelier du piment, petits sentiers tranquilles, dixit le guide. Trois heures plus tard, mes bottes montantes toutes neuves couvertes de boue jusqu’aux genoux nous déclarons enfin forfait et retournons dans le centre. On s’est sûrement trompés de chemin, on a dû prendre un mauvais tournant, peu importe. C’était une très belle expérience. Nous avons quand même vu l’atelier du piment, le petit champ, les séchoirs, les fours. Mais nous avons surtout vu ce pays basque vallonné et verdoyant, couvert de lierre et parcouru de joyeux petits ruisseaux que j’étais venue chercher. Dix fois au moins je suis tombée amoureuse d’une maison traditionnelle un peu écartée de grands chemins, dix fois au moins j’ai eu envie de m’installer (mais il paraît qu’une relation particulière règne dans ce pays entre les propriétaires et leur propriété, qu’en est-il vraiment aujourd’hui ?).




Un autre coup de cœur, le très petit et très mignon village de Sare (gâteaux basque d’exception au comptoir de l’hôtel Arraya et la ferme de Ihitia). San Sebastian un soir pour participer à l’ambiance tapas. Les innombrables bars et restaurants de Biarritz centre, et notamment rue Gambetta (mention spéciale pour Puig & Taro – même à l’heure de pointe dans la cohue totale de clients affamés, ils prennent le temps de vous remarquer, de comprendre ce que vous voulez et de vous dénicher une petite table à l’intérieur alors que cela à tout l’air d’une mission impossible) L’hôtel Saint Julien et ses propriétaires d’une gentillesse … (et quand en début de novembre on vous propose de ranger votre matériel de surf dans le réduit à l’arrière, ce n’est pas une blague !). Les magasins de déco avenue Victor Hugo et un peu partout – enfin, je suis en manque depuis notre déménagement bien que – Treimann à Tallinn, à conseiller fortement, mais c’est une autre histoire (de Noël). La villa Arnaga d’Edouard Rostand – un moment hors du temps fait pour la rêverie.


Bref, nous avons adoré, nous avons envie d’y retourner, explorer plus, goûter, grimper, nous promener, nous laisser bercer par le roulement des vagues, prendre un cours de surf, courir au petit matin sur la plage, prendre un deuxième thé chez Miremeont. En famille cette fois-ci, pourquoi pas ?